Notre 202

De la sortie de Nice à La Mescla.

Avec Mr. Pierre Richert…

Avec cette série d’albums, nous verrons l’évolution de cette route, de ses ponts et des villes traversées. Elle a permis le désenclavement de notre arrière-pays.
Pour commencer, quelques-uns des chantiers les plus significatifs .

carteEt pour débuter l’histoire, je vais donc parler de la Route Impériale 205, juste pour embêter tout le monde …

L’endiguement du Var

Le lit du Var, dans sa partie basse, ne cesse, depuis la fin du XVIIIe siècle, de s’élargir en érodant toujours plus, à chacune de ses nombreuses crues, les terrains cultivés qui le jouxtent. Ainsi, ces terres fertiles se voient menacées de disparition à moyen terme. Or une telle situation serait fort préoccupante pour Nice qui subit déjà une forte insuffisance agricole.
Les maigres ressources de la ville, malgré le tourisme hivernal, ne permettraient que difficilement d’importer d’avantage de produits agricoles. L’endiguement du Var sur sa rive gauche a pour effet de soustraire « 500 hectares de bois et de graviers (…) aux inondations » et d’y créer des terres fertiles, grâce aux limons importants charriés par le fleuve. De plus il empêche 1 000 hectares de terrains d’alluvions de disparaître lors de prochaines et inévitables crues.
Un endiguement du Var a également un fort intérêt d’un point de vue de la santé publique. En effet, « le Var par la nature des limons qu’il charrie, par les caprices de son cours sinueux, (…) se prête à la formation de foyers pestilentiels », coupables de provoquer des fièvres paludéennes. Un endiguement du Var revient à canaliser les eaux du fleuve, lui ôtant ainsi toute sinuosité et tout risque de s’assécher par endroits en des marécages paludéens.
Mais la construction d’une digue le long du Var, de son embouchure à Baus-Roux sur une longueur de 23 084 mètres, va également permettre l’établissement d’une route carrossable servant de tronc commun aux quatre grandes vallées de l’arrière-pays niçois, les vallées de l’Estéron, de la Vésubie, du Var et de la Tinée. Elle est la composante indispensable à une liaison rapide avec ces vallées.

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Route par l’intérieur des terres.

Se substituant au projet d’une route commune passant par Levens ou même à flanc de colline, la construction d’une route sur le couronnement de la digue du Var a pour elle de multiples avantages ; la construction en est aisée, puisque établie sur une surface plane et stabilisée, elle va au plus rapide par une succession de longues lignes droites et de larges courbes ; la montée de Nice à Saint-Martin-du-Var est progressive, 115 mètres de dénivelée sur 23 kilomètres, soit 0,0005 m/m ; l’importance des terrains gagnés sur le lit du Var permet d’anticiper à long terme un éventuel élargissement de la chaussée sans poser de problèmes techniques.

 

Dès le 18 août 1860, un décret impérial déclarant d’utilité publique l’exécution des travaux d’endiguement du Var est promulgué. L’Etat français prend la totalité du coût des travaux à sa charge en prélevant les dépenses sur les fonds de navigation. Les travaux reprennent dès novembre 1860 sur la section de digue comprise entre Baus-Roux et la Combe, soit sur 11,450 km, et celle-ci est achevée en 1864 moyennant une dépense de 877 075,94 francs. Il est prévu la construction d’une digue de 11 634 mètres de long, entre la Combe et la mer. Le couronnement de la digue est porté dans un premier temps à 8 mètres jusqu’à Matière (à l’emplacement de l’actuel échangeur autoroutier de Saint-Isidore) puis, de là à la mer, il se verra élargi à 8.80 mètres, contre 7 mètres pour les réalisations sardes. Son exécution débute en janvier 1862 et connaît quelques problèmes de gestion du travail du fait d’un nombre trop important de sous-traitants, ce qui nuit à la bonne marche de l’entreprise, et ce jusqu’en 1866 date à laquelle le marché est résilié et la mise en régie ordonnée. Les travaux reprennent alors à un rythme soutenu pour s’achever le 5 juillet 1869. La dépense totale sur cette section est de 400 000 francs L’endiguement du Var est alors effectif sur toute sa longueur, de Baus-Roux à la mer et vingt-cinq ans après les premiers travaux, l’entreprise est enfin accomplie dans sa totalité.

 

 La route impériale 205 dite de Nice à Barcelonette

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1922

 

A son classement, il est prévu que la R.I. 205 prenne son origine à son embranchement avec la R.N. 7 au pont sur le Var, face à Saint-Laurent , poursuive le long du fleuve jusqu’à Baus-Roux pour ensuite s’enfoncer dans le défilé du Chaudan.

 

 

 

A sa sortie, à la Mescla, elle suit la vallée de la Tinée jusqu’à Saint-Etienne pour monter sur un des cols joignant la vallée de la Tinée à celle de la Haute Ubaye pour ensuite descendre sur Barcelonnette.

Cette route nous intéresse sur deux points car de son origine à la Mescla elle longe le Var sur près de 35 km et jusqu’en 1893 c’est, de toutes les routes du Haut pays niçois, celle à qui on accorde le plus d’importance, puisque devant assurer une liaison directe entre Nice et Barcelonnette.
Mais la proximité de la frontière, doublée d’une détérioration sans cesse croissante des relations franco-italiennes à compter de l’année 1881, vont amener les autorités militaires à s’opposer au prolongement de la route sur Barcelonnette. Cette situation profitera immédiatement au désenclavement de la vallée du Var et plus particulièrement au Haut-Var, puisqu’on cherche alors un tracé plus à l’ouest pour rejoindre Barcelonnette, un tracé le long du Var répond entièrement à cette attente. La prise d’importance de la route du Var est essentiellement due au « coup d’arrêt » porté à la route de la Tinée par les impératifs de défense du territoire national.

 

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Pont de la Mescla

L’étude sur la R.I. 205, puis R.N. 205, ne porte ici que sur la partie longeant le Var, entre le pont de Saint-Laurent-du-Var et la Mescla, section qui sera d’ailleurs plus tard rattachée à la R.N. 202.
C’est en 1863 que débutent les premiers travaux destinés à l’établissement d’une route dans la basse vallée du Var. Le chemin de fer destiné au rechargement des blocs de défense de la digue était alors placé sur le milieu de la route, interdisant de fait la circulation. Un simple déplacement de cette voie ferrée à permis l’établissement d’une première voie charretière. Ce tronçon, d’une longueur de 11,250 km, s’étend entre Baus-Roux et la Combe, ce qui correspond alors à la partie achevée de la digue du Var. La largeur de la route n’est que de 3,30 mètres, ce qui demeure insuffisant pour le croisement des voitures.

colomarsDe plus « il n’y a (…) pas d’empierrement et (…) la route devient impraticable après les pluies ». Ces travaux se limitent à l’exécution de 56 gares d’évitement établies tous les 200 mètres. Les travaux débutent en juin 1863 et sont achevés en début d’année 1864. De juin 1864 à juin 1865 des travaux sont entrepris entre Baus-Roux et la Manda, soit sur 12,250 km ; ils consistent en l’exécution sur la voie actuelle d’une chaussée empierrée de 2,70 mètres de largeur sur 0,10 mètres d’épaisseur et la dépense se monte à 22 500 francs. Le 16 septembre 1867 la première partie de la R.I. 205, comprise entre la R.I.7 et Baus-Roux, est livrée dans sa totalité à la circulation.

Jusqu’à présent elle suivait un vague chemin entre son origine et Lingostière, sur environ 5 000 mètres, pour ensuite se frayer un chemin dans le lit même du Var sur 4 000 mètres et se joindre enfin à la digue au vallon de la Combe jusqu’à Baus-Roux.
La construction de la section de route comprise entre la R.I.7 et la Manda a été exécutée au fur et à mesure de l’établissement de la digue, les travaux routiers ayant été ici indissociables de ceux liés à l’endiguement. Si la route et la digue ont suivis la même évolution dans la construction, on notera tout de même que cette dernière n’est livrée de manière définitive en son entier que le 5 juillet 1869 et sa largeur varie de 3,30 mètres à 4,10 mètres selon la largeur du couronnement de la digue et la place occupée par la voie ferrée.

Ces irrégularités vont pousser les ingénieurs du département à prévoir dès 1868 l’élargissement du couronnement de la digue du Var à 8,80 mètres et ce sur toute sa longueur, afin que la route soit élargie à 4,50 m, sans pour autant retirer la voie ferrée, considérée comme indispensable en raison de sa fonction de transport des matériaux destinés aux travaux sur la digue et à ses rechargements. Les premiers travaux débutent en juin 1872 pour s’arrêter dans le courant de l’année 1876 et reprendre en novembre 1877 et s’achever définitivement fin décembre 1877. La dépense totale est de 78 153.84 francs.

 

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Si ce n’est quelques légères améliorations et la reconstruction du pont sur la Vésubie, la R.N.205, dans sa partie comprise entre la R.N. 7 et la Mescla, ne va plus connaître de travaux d’importance, mais l’élargissement progressif de la chaussée à 4,85 et 5 mètres entre Nice et Plan-du-Var, au lieu de 4,50 mètres. C’est que l’intérêt de la R.N.205, qui était de relier Nice à Barcelonnette par les cols de la Bonnette-Restefond, n’a plus raison d’être depuis l’opposition des autorités militaires au prolongement de cette route sur la Haute Ubaye par suite de la tension politique existant entre la France et l’Italie. C’est le reclassement de la Route nationale des Alpes, de Nice à Thonon, qui va permettre de relancer l’exécution de travaux d’importance dans la basse vallée du Var.

Par suite d’une crue de la Vésubie, en novembre 1916, le pont de la R.N.205 qui l’enjambait auparavant est presque entièrement emporté, interrompant totalement la circulation. Un passage provisoire est rapidement donné à la circulation par l’aménagement sur 800 mètres d’une partie de la voie du tramway de la Vésubie qui franchit cette rivière un peu en amont. La dépense pour cet aménagement provisoire se monte à 22 000 francs.
Si jusqu’à présent on semblait s’orienter vers une simple restauration du pont, c’est en fait sur son remplacement par un ouvrage en béton armé que se porte finalement le choix du ministère des Travaux Publics.

045_001En attendant la construction de cet ouvrage, il est décidé en octobre 1919 d’établir un pont militaire, d’une portée de 75 mètres, afin de mettre fin à la circulation alternée mise en place par la déviation de la R.N. 205, sur le pont et la plate-forme du tramway de la Vésubie. L’établissement de cet ouvrage, prévu pour février 1920, ne peut être exécuté avant la fin avril 1920 et la circulation sur cet ouvrage, limitée au passage de véhicules de moins de 12 tonnes, est enfin établie le 25 juillet 1920 pour un coût de 95 000 francs. Cette importante dépense mécontente, à juste titre, le ministère des Travaux Publics qui « constate avec regret que l’opération entreprise est beaucoup trop
onéreuse pour l’amélioration de peu d’importance et de courte durée qu’elle va permettre de réaliser ».

 
durandyDans le même temps un projet définitif de pont sur la Vésubie a été adopté le 15 décembre 1919, il s’agit d’établir un ouvrage à travée unique d’une ouverture de 100 mètres, d’une largeur totale de 8 mètres dont 7 mètres pour la chaussée et 0,50 mètres pour chacun des deux trottoirs et dont le garde-corps est en béton armé.

 

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Les travaux débutent en août 1921, alors que la partie de la R.N.205 comprise entre la R.N.7 et la Mescla a été reclassée et intégrée à la nouvelle R.N. 202. Les travaux sont achevés à la fin du mois de juin 1922 pour une dépense de 655 000 francs. Le 19 août 1922, par un décret préfectoral, cet ouvrage est dénommé « Pont Alexandre Durandy ».

 

 

Les différents tronçons historiques de la future 202

Pour essayer de s’y retrouver;

– Route Impériale 205
De Nice à Barcelonnette par le Var et la Tinée
Classée le 18 août 1860

– Route Départementale 2
De la Mescla à Guillaumes
Classée le 18 août 1860

– Chemin de Grande Communication 16
De Guillaumes à Entraunes
Classée le 18 août 1860

– Route Impériale 207
D’Avignon à Nice
Classée le 7 décembre 1867

– Route Nationale 210
De Pont de Gueydan à Barcelonnette
Classée le 30 juillet 1894

– Route Nationale 202
D’Evian à Nice
Classée le 16 décembre 1920

 

Quelques photos qui témoignent de la volonté permanente de laisser grandir l’espace dédié à la circulation automobile.

 

Un trés grand merci à Monsieur Pierre Richert pour son travail d’écriture à partir de l’étude sur  « LE DÉSENCLAVEMENT ROUTIER DE LA VALLÉE DU VAR DU MILIEU DU XIXe A 1930 » de Monsieur Olivier Libergé.

Mise en page, recherche, et archive : Infos Des Vallées

 

 

 

 

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